La réserve de Bandia, située à une vingtaine de kilomètres de Saly-Portudal (ouest), abrite la plus grande population de girafes au Sénégal, dont la plus vieille femelle du pays, qui fêtera bientôt ses 30 ans.
A l’occasion de la Journée mondiale de la girafe célébrée ce 21 juin, l’APS est allée à la rencontre des guides de la réserve pour observer de près cet animal emblématique de l’Afrique et plus grand mammifère en hauteur, qui peut mesurer jusqu’à 5,8 mètres de long. Un animal dont le cou peut atteindre trois mètres.
Au début, la réserve n’abritait que deux couples arrivés en 1997, sept ans après la création de la réserve. Aujourd’hui, elles sont près d’une centaine de girafes à vivre en semi-liberté sur un espace de 3.500 hectares. Elles sont toutes arrivées à Bandia un âge compris entre deux ans et demi et trois ans. Trois d’entre elles sont mortes, ce qui fait de la quatrième leur doyenne.
Certaines sous-espèces en danger critique d’extinction
Seuls quelques guides, les anciens notamment, peuvent reconnaître la vieille femelle, qui a mis bas il y a un mois. ‘’Les naissances se font tous les trois ans pour chaque femelle, et la gestation dure quinze mois’’, explique Ousmane Niang, l’un des guides.
Selon lui, il faut beaucoup de chance pour voir cette fameuse girafe dans la réserve, car elle est souvent isolée des groupes en raison de son âge avancé. Une ballade dans le circuit de la réserve a permis de rencontrer de nombreux troupeaux de jeunes girafes, mais il n’y avait nulle part l’ombre de la doyenne.
La particularité des girafes qui accouchent est qu’elles le font debout. Les nouveau-nés tombent à près de trois mètres de haut. Les girafons sont aussitôt prêts à gambader dans la savane.
Venues tout droit d’Afrique du Sud, les girafes de la réserve de Bandia appartiennent à l’espèce dite des giraffa camelopardalis, ce qui, en latin, veut dire chameau-léopard. L’espèce elle-même est subdivisée en neuf sous- espèces, dont celle de la girafe d’Afrique du Sud (giraffa), la seule sous-espèce qui existe au Sénégal.
Ces sous-espèces vivant jusqu’à trente ans en captivité et vingt-cinq ans en liberté se différencient généralement par leur couleur et la forme de leur pelage tacheté, d’ailleurs très prisé par les braconniers.
La dernière sous-espèce de girafe d’Afrique de l’Ouest connue sous le nom de girafe peralta existait encore au Sénégal jusque dans les années 50, selon Ndiaga Niang, guide à la réserve depuis dix-sept ans. ‘’De manière générale, les girafes sont en voie d’extinction’’, se désole-t-il.
Un constat corroboré par l’ONG internationale Girafe Conservation Fondation (GCF) et l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).
Dans les années 1980, le nombre total de girafes en Afrique était estimé à plus de 155.000 individus, selon la GCF. Aujourd’hui, l’ONG estime la population actuelle de girafes en Afrique à environ 117.000 individus.
Le cœur de la girafe peut peser 12 kilos
L’UICN a mené en 2016 la première évaluation détaillée de l’état de conservation des girafes en révélant que leur nombre est en péril. Ce constat a été confirmé par l’évaluation en 2018 de la majorité des sous-espèces reconnues par l’UICN, dont certaines sont en danger critique d’extinction.
La réserve de Bandia joue un rôle important dans la préservation et la protection de plus d’une centaine d’espèces d’animaux, dont la girafe d’Afrique du Sud. Ces girafes se nourrissent principalement de feuilles d’acacia, leur arbre favori qui recouvre quasiment tous les endroits de la réserve, au milieu de plusieurs dizaines de baobabs millénaires.
Face aux prédateurs, la girafe est très avantagée grâce à sa hauteur, selon Ousmane Niang. ‘’Le lion, qui est son unique prédateur, atteindra difficilement sa jugulaire. C’est heureux qu’il n’y en a pas dans la réserve’’, rassure-t-il.
‘’La girafe ne mène aucune compétition pour se nourrir, car elle est le seul animal à manger en hauteur […] Elle voit le danger arriver d’assez loin et, son cœur qui pèse jusqu’à 12 kilos, permet au sang de faire près de trois mètres avant d’atteindre le cerveau’’, poursuit le guide.
Malheureusement, son cou n’est pas suffisamment long pour atteindre le sol et lui permettre de boire de l’eau. ‘’La girafe est contrainte de plier ou d’écarter les pattes pour atteindre le sol mais elle est tellement vigilante qu’elle prend bien soin de regarder autour avant de se retrouver dans cette position très vulnérable face aux prédateurs’’, précise le guide.
Pour protéger le cerveau des changements brusques de pression artérielle lorsqu’elle boit, la girafe dispose d’un système coronaire qui régule le flux sanguin. D’ailleurs, les vaisseaux sanguins des pattes de la girafe ont même été étudiés par la NASA pour être utilisés dans la conception de combinaisons spatiales, poursuit Ousmane Niang.
De nombreux scientifiques continuent encore d’étudier la girafe, particulièrement son cou mais aussi la couleur de son pelage à travers les sous-espèces.