Récompensé pour son roman La plus secrète mémoire des hommes, Mohamed Mbougar Sarr est entré à plus d’un titre dans l’histoire du Prix Goncourt ce mercredi. L’auteur sénégalais est le premier auteur d’Afrique subsaharienne à être sacré. A seulement 31 ans, il est aussi le plus jeune lauréat du prestigieux prix littéraire depuis Patrick Grainville, primé à 29 ans en 1976.
« Il n’y a pas d’âge en littérature. On peut arriver très jeune, ou à 67 ans, à 30 ans, à 70 ans et pourtant être très ancien », a-t-il déclaré aux médias prêts à recueillir sa première réaction à la mi-journée au restaurant Drouant à Paris.
« Espérons que le Goncourt ne lui coupera pas son désir de poursuivre »
« Avec ce jeune auteur, on est revenu aux fondamentaux du testament du Goncourt, a affirmé Philippe Claudel, membre du jury. Espérons que le Goncourt ne lui coupera pas son désir de poursuivre. » Il y a peu de risques que cela se produise tant la littérature le passionne, depuis l’enfance.
Né en 1990 à Diourbel (Sénégal), Mohamed Mbougar Sarr, fils de médecin, s’est très vite révélé bon élève et grand lecteur. A l’heure des études supérieures, il a rejoint une classe préparatoire littéraire à Compiègne (Oise), puis la prestigieuse Ecole des hautes études en sciences sociales. Il y a entamé une thèse sur Léopold Sedar Senghor, la grande voix de la littérature africaine et chantre de la « négritude » et ne l’a pas terminée. « J’ai commencé à beaucoup écrire à ce moment-là, et la fiction l’a emporté », explique-t-il.
« Etre un écrivain africain publié en France peut être compliqué »
Son premier roman, Terre Ceinte, a été publié chez Présence africaine, alors qu’il n’avait que 24 ans. Son deuxième, Silence du cœur, a suivi trois ans plus tard. Philippe Rey, éditeur à l’expertise reconnue pour la littérature francophone, l’a convaincu de le rejoindre pour les troisième et quatrième, De purs hommes, en 2018, et La plus secrète mémoire des hommes, qui lui a valu la consécration cet automne.
« J’ai eu beaucoup de chance, d’avoir été soutenu : ce n’est pas le cas de tous les écrivains africains. Ni de tous les écrivains tout court ! Je suis bien conscient qu’être un écrivain africain publié en France peut être compliqué, comme pour tous ceux qui viennent d’une marge, expliquait en septembre à l’AFP, Mohamed Mbougar Sarr, qui vit aujourd’hui à Beauvais (Oise). Mais c’est en train de changer. Que la littérature africaine reste largement à connaître, c’est aussi une chance pour elle. »