Israël a intensifié ses bombardements sur la bande de Gaza dans la nuit de samedi à dimanche en préparation à une invasion terrestre, après deux semaines d’une guerre déclenchée par l’attaque sanglante du mouvement islamiste palestinien Hamas.
Les Etats-Unis ont parallèlement annoncé le renforcement de leurs moyens militaires dans la région pour y prévenir un embrasement généralisé tandis que la tension monte à la frontière entre Israël et le Liban.
Pendant la nuit, des frappes ont notamment visé la ville de Rafah, dans le sud, proche de la frontière avec l’Egypte, et des nuages de fumée s’élevaient au-dessus de la ville de Gaza, dans le nord, selon des journalistes de l’AFP.
Selon le gouvernement du Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza, au moins 80 personnes ont été tuées.
« Pendant la nuit nous avons accru nos attaques », a déclaré dimanche un porte-parole de l’armée israélienne, le général Daniel Hagari, affirmant que « des dizaines » de combattants du Hamas ont été tués, dont un responsable de l’armement du mouvement.
« Nous allons aborder la prochaine étape de la guerre dans les meilleures conditions pour l’armée », a-t-il ajouté.
Autre foyer de tension, le nord d’Israël, où les échanges de tirs se multiplient entre l’armée et le Hezbollah pro-iranien, allié du Hamas et basé dans le sud du Liban, tandis que les habitants évacuent la zone frontalière de part et d’autre.
Ces évacuations « vont donner à l’armée israélienne une plus grande liberté d’action dans la région », a indiqué le général Hagari.
Le Hezbollah « entraîne le Liban dans une guerre dont il ne tirera aucun profit, mais dans laquelle il risque de perdre beaucoup », a averti dimanche un autre porte-parole de l’armée, Jonathan Conricus.
– « Gaza est complexe » –
Depuis l’attaque du Hamas le 7 octobre sur son territoire, Israël s’est juré « d’anéantir » le mouvement palestinien, classé organisation terroriste par les Etats-Unis, l’Union européenne et Israël.
« Nous allons entrer dans Gaza, nous allons le faire pour un but opérationnel, détruire les infrastructures et les terroristes du Hamas, et nous allons le faire de manière professionnelle », a affirmé samedi le chef d’état-major israélien, le général Herzi Halevi.
Le 7 octobre, en plein Shabbat, le repos juif hebdomadaire, et au dernier jour des fêtes de Souccot, des centaines de combattants du Hamas avaient infiltré le territoire israélien depuis la bande de Gaza, semant la terreur lors d’une attaque sans précédent depuis la création d’Israël en 1948.
Plus de 1.400 personnes ont été tuées en Israël, en majorité des civils fauchés par balles, brûlés vifs ou mutilés le jour de l’attaque, selon les autorités israéliennes.
Dans la bande de Gaza, au moins 4.385 Palestiniens, majoritairement des civils, ont été tués dans les bombardements incessants menés en représailles par l’armée israélienne, selon le ministère de la Santé du Hamas.
L’armée israélienne a massé des dizaines de milliers de soldats aux frontières de ce territoire pauvre et exigu où vivent 2,4 millions de Palestiniens, ainsi qu’à la frontière libanaise.
Une opération terrestre dans la bande de Gaza s’annonce périlleuse dans ce territoire surpeuplé, truffé de pièges mortels et de tunnels, face à des combattants du Hamas aguerris qui détiennent 212 otages israéliens ou étrangers, selon l’armée israélienne.
« Gaza est complexe, Gaza est densément peuplé, l’ennemi y prépare beaucoup de choses, mais nous nous préparons aussi pour lui », a prévenu le général Halevi. « Et nous garderons en tête les photographies et les images, ainsi que les morts d’il y a deux semaines ».
A six kilomètres de la frontière avec Gaza, le kibboutz de Beeri, où les commandos du Hamas ont massacré au moins 100 personnes le 7 octobre, se prépare à de nouveaux enterrements dimanche.
« Je ne suis pas certain qu’un seul d’entre nous soit en mesure d’assimiler et de comprendre ce qui s’est passé », raconte Romy Gold, un ancien parachutiste de 70 ans, qui s’apprête à assister aux funérailles de cinq membres d’une même famille.
« Il nous faut l’assurance que cela n’arrivera plus », dit-il, « et ce n’est pas le sentiment que nous avons ».
– Situation « catastrophique » à Gaza –
Israël appelle quotidiennement depuis le 15 octobre les civils du nord de la bande de Gaza à fuir vers le sud pour se mettre à l’abri.
Mais les frappes se poursuivent aussi dans le sud.
Dans la ville de Khan Younès, 13 personnes ont été tuées et 60 blessées, selon le gouvernement du Hamas, dans un bombardement sur un immeuble abritant un café et des magasins. « J’ai vu des corps brûlés et des dizaines de blessés emportés par les médecins », raconte Rahi Sharab, 50 ans, qui habite en face de l’immeuble.
Selon l’ONU, au moins 1,4 million de Palestiniens ont été déplacés depuis le début du conflit et la situation humanitaire dans le territoire est « catastrophique ».
« Le temps est compté avant que les taux de mortalité ne montent en flèche en raison de l’apparition de maladies et du manque de capacités en matière de soins de santé », ont averti samedi cinq agences de l’ONU. Des cas de varicelle, de gale et de diarrhée en raison du manque d’eau potable ont été signalés.
Soumise à un blocus israélien terrestre, aérien et maritime depuis que le Hamas y a pris le pouvoir en 2007, la bande de Gaza est placée depuis le 9 octobre en état de « siège complet » par Israël qui y a coupé l’eau, l’électricité et l’approvisionnement en nourriture.
Samedi, un convoi de vingt camions transportant de l’aide humanitaire est entré depuis l’Egypte par le poste-frontière de Rafah, la seule issue de la bande de Gaza qui ne soit pas contrôlée par Israël, qui a été à nouveau fermé ensuite.
Selon le Bureau des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA), ces vingt camions n’équivalent qu’à 4% des importations quotidiennes de Gaza avant le début de la guerre et au moins 100 camions par jour seraient nécessaires.
Dimanche à Rafah, des dizaines de personnes faisaient la queue devant une boulangerie ou attendaient de pouvoir remplir des jerrycans d’eau, pendant que d’autres fouillaient les décombres de maisons détruites. Dans la localité de Deir al-Balah, dans le centre de la bande de Gaza, les corps de nombreux enfants étaient allongés sur le sol ensanglanté d’une morgue.
– Renforcement américain –
Face aux « escalades de l’Iran et de ses forces affiliées », le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin a annoncé le déploiement de plusieurs systèmes de défense antimissiles « à travers la région », sans préciser où exactement, et le placement en état de « pré-déploiement » de moyens militaires supplémentaires, sans préciser leur nombre.
« Ces mesures renforceront les efforts de dissuasion régionale, augmenteront la protection des forces américaines dans la région et contribueront à la défense d’Israël », a déclaré M. Austin.
Après le 7 octobre, les Etats-Unis ont déjà déployé deux porte-avions et leurs navires d’escorte en Méditerranée orientale pour protéger Israël.
Depuis le 7 octobre, 90 personnes, selon le ministère de la Santé palestinien, ont aussi été tuées en Cisjordanie occupée, par l’armée israélienne ou des habitants des colonies.
Des frappes israéliennes dimanche ont également mis hors service les deux principaux aéroports de Syrie, à Damas et Alep, selon les médias d’Etat citant une source militaire.