Mercredi soir, plus de 200 personnes, dont une centaine de membres du régiment ukrainien Azov, et dix étrangers ont été libérés par la Russie en échange de 55 prisonniers détenus par Kiev, dont le proche de Vladimir Poutine Viktor Medvedtchouk.
C’est le plus important échange de prisonniers depuis le début de la guerre en Ukraine. Kiev et Moscou ont procédé à un échange de détenus militaires, ont révélé les autorités ukrainiennes mercredi 21 septembre, peu après l’annonce par Vladimir Poutine de la mobilisation de centaines de milliers de réservistes pour relancer son offensive en Ukraine.
« Nous avons réussi à libérer 215 personnes », a précisé, mercredi soir, à la télévision, le chef de l’administration présidentielle ukrainienne, Andriï Iermak.
Kiev a notamment récupéré 188 « héros » ayant défendu l’aciérie Azovstal à Marioupol, symbole de la résistance à l’invasion russe, dont 108 membres du régiment Azov. Cinq commandants militaires, dont des chefs de la défense d’Azovstal, ont été transférés en Turquie, a souligné le président ukrainien, Volodymyr Zelensky.
Ils resteront dans ce pays « en sécurité absolue et dans des conditions confortables » jusqu' »à la fin de la guerre » aux termes d’un accord avec le président turc, Recep Tayyip Erdogan, selon le chef de l’État ukrainien.
Le cas Viktor Medvedtchouk
La Russie a récupéré 55 prisonniers, dont l’ex-député Viktor Medvedtchouk, un proche du président russe, Vladimir Poutine, accusé de haute trahison en Ukraine, a précisé Volodymyr Zelensky dans son adresse quotidienne.
L’oligarque de 68 ans, chef de l’opposition pro-russe, s’était échappé de sa résidence surveillée en Ukraine quelques jours avant l’invasion russe du 24 février. Il a été à nouveau arrêté en avril. Il risque la prison à vie en Ukraine pour trahison et complicité avec une organisation terroriste. Il est accusé d’avoir servi d’intermédiaire dans l’achat de charbon pour la république séparatiste de Donetsk, soutenue par la Russie, dans l’est de l’Ukraine.
Plusieurs experts affirment que Vladimir Poutine est le parrain de sa plus jeune fille. Sa détention a suscité des échanges animés entre les responsables de Moscou et de Kiev. Viktor Medvedchouk est le chef du conseil politique du parti d’opposition ukrainien pro-russe Plate-forme pour la vie, le plus grand groupe d’opposition au parlement ukrainien. Le gouvernement a suspendu l’activité du parti.
« Il n’est pas regrettable d’échanger Medvedchouk pour de vrais guerriers », a déclaré Zelensky dans son discours vidéo nocturne. « Il a déjà passé toutes les étapes de l’enquête, conformément à la loi. L’Ukraine a reçu de lui tout ce qui est nécessaire pour établir la vérité dans le cadre d’une procédure pénale. »
Les officiels russes, de leur côté, se sont contentés de confirmer que les prisonniers libérés étaient désormais sur le sol russe, sans précision sur leur nombre ni allusion à Viktor Medvedtchouk.
« Tous les militaires ont été livrés sur le territoire de la Fédération de Russie par des avions de transport militaire et se trouvent dans des établissements médicaux du ministère russe de la Défense », a indiqué le ministère dans un communiqué.
Une communication minimaliste évocatrice d’une certaine gêne des autorités vis-à-vis de l’opinion publique russe, selon certains observateurs.
Dix prisonniers étrangers
Parmi les prisonniers de guerre libérés par Moscou figurent dix étrangers dont cinq Britanniques, deux Américains, un ressortissant du Maroc, de la Suède et de la Croatie, selon un responsable saoudien informé de l’opération.
La Première ministre britannique, Liz Truss, a déclaré, sur Twitter, que la libération des Britanniques était « une nouvelle extrêmement bienvenue… mettant fin à des mois d’incertitude et de souffrance pour eux et leurs familles ».
Liz Truss a déclaré qu’ils avaient été « détenus par des forces soutenus par la Russie dans l’est de l’Ukraine » et a remercié Volodymyr Zelensky et l’Arabie saoudite d’avoir contribué à leur libération.
Sur Twitter, le député Robert Jenrick a identifié l’un des détenus britanniques comme étant Aiden Aslin, condamné à mort en juin en tant que mercenaire présumé après avoir été capturé par des séparatistes pro-russes.
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La Maison Blanche a également remercié le président ukrainien et le prince héritier saoudien, Mohammed ben Salman, pour avoir facilité l’échange.
« Nous avons hâte que nos citoyens soient réunis avec leurs familles », a déclaré le conseiller américain à la sécurité nationale, Jake Sullivan, dans un communiqué publié sur Twitter.
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Le détenu marocain est Brahim Saadoun, également condamné à mort en juin par la République populaire autoproclamée de Donetsk, selon un responsable marocain de l’ambassade à Riyad.
À Zagreb, le ministère des Affaires étrangères a déclaré que le Croate libéré, Vjekoslav Prebeg, détenu en avril, reviendrait jeudi, remerciant Kiev et Riyad.
Ces libérations font suite aux efforts déployés par le prince Mohammed, dirigeant de facto de l’Arabie saoudite, « dans le prolongement de (son) engagement en faveur des initiatives humanitaires visant à résoudre la crise russo-ukrainienne », selon le communiqué saoudien.
Une vidéo diffusée par l’agence de presse officielle saoudienne montre les dix prisonniers de guerre accueillis à leur descente d’avion à Riyad, puis escortés dans une salle où ils discutent avec des diplomates de leurs ambassades respectives.