Mohamed Mbougar Sarr a la dent dure, l’écriture transgressive, sa lucidité ne laisse rien passer, et le fait que cet étudiant en philosophie soit installé à Paris ne l’éloigne pas, peut-être même le contraire, comme on le voit souvent, de la réalité de sa société.
Ce livre, explique – t-il, est peut-être l’un des premiers sujets sur lesquels il aurait pu écrire, sans se douter qu’il deviendrait un écrivain reconnu aujourd’hui, quand il a découvert une vidéo au Sénégal en 2008, montrant le cadavre d’un supposé homosexuel en train d’être déterré du cimetière musulman par une foule haineuse.
C’est ainsi que s’ouvre De purs hommes, dont le narrateur, Ndéné, est un peu à l’image de l’auteur à l’époque, relativement compréhensif par rapport à cet acte violent contre l’homosexuel, celui qu’on nomme en wolof « goor jigeen », homme-femme. Sa compagne, la libre Rama, sensuelle, bisexuelle, en veut à Ndéné de ne pas se révolter aussitôt contre le sort réservé à cet homme.
Mohamed Mbougar Sarr confie qu’il n’était pas loin, à l’époque, de réagir comme son personnage. Et que cette affaire lui a permis d’entamer pour lui-même une réflexion sur la question de l’homosexualité dans son pays.
Des années plus tard, il en fait ce roman à la fois documenté, palpitant, audacieux dans sa liberté à décrire la sexualité, d’une modernité de point de vue et de langage percutante.
Il offre une véritable plongée dans la société sénégalaise au miroir de son rapport à ceux qui dérangent.